Elias

Bonjour le monde...

Voici Elias, Thomas Bossé et c'est ce matin, 31 mai 2009, que le loustic a pointé le bout de son nez... à 4h30.

petit retour en arrière.

Samedi 23 mai, Inès en a ras le bol et est prête à tout pour faire sortir ce bonhomme de son ventre. Prévu pour le 20 juin, le bébé n'est désormais plus considéré comme prématuré et peut naître normalement sans inquiétude. Ce samedi 23 mai donc... Évènement, c'est le grand concert de la famille EKONDO au Centre Culturel Français de Libreville. Inès, tant bien que mal, fait le déplacement et s'installe au premier rang. Après quelques minutes déjà, il faut remonter toutes les marches pour sortir de la salle, puis redescendre  d'autres marches pour aller au sous-sol, direction les toilettes... On remonte puis dans la descente... Contractions !!! Agathe, notre copine, qui a soutenu et accompagné Inès dans son petit périple urinaire, est en panique et croit à l'accouchement, là sur les marches du CCF... non, fausse alerte. Inès reprend sa longue route vers le fauteuil et peut profiter, malgré quelques autres contractions, du spectacle. Au milieu du show, petit tour sur la scène, pour esquisser quelques pas de danse avec sa soeur Laurianne. Apparition de Tristan et Anaïs, munis de pancartes, sur scène lors du morceau "stop sida". Fin du spectacle, Tristan est invité à nouveau sur scène pour danser le titre phare de son grand père "Bovenga Nguoye". Tristan se déchaîne et danse avec une grande classe... Vraiment il a grandi et ses pas de danses se sont affinés. Je ne l'avais pas vraiment vu danser depuis quelques temps, mais là je suis époustouflé... Et ne m'accusez pas de subjectivité, je parle avec mon objectivité légendaire... Surtout quand il s'agit de mon fils... Bon, bref, le spectacle se termine, sans que cela ne produise l'effet escompté pour Inès, nous rentrons à la maison sans passer par la maternité !!!

Vendredi 29 mai, 18h00. Tristan, Anaïs et moi, allons chercher mes parents à l'aéroport. Belles retrouvailles pour Tristan et moi, les larmes ne sont pas loin, comme d'habitude... Anaïs les regarde avec circonspection... Ca fait six mois qu'elle voit régulièrement ces deux têtes là dans un petit carré flou sur l'écran d'ordinateur, mais là, en vrai, ils ont quand même des têtes un peu bizarres... Quelques petites heures d'adaptation et elle ne cessera plus de crier dans toute la maison "PAPI", "MAMI"... On est content de les avoir , là, près de nous.. On espère juste qu'ils seront là à la naissance et qu'Elias ne fera pas le coup des deux autres à ses grand parents. Tristan avait tout fait en 2003 pour éviter ses grand parents paternels et sa grand mère maternelle (la mère d'inès montait dans son avion de retour au Gabon à l'heure même ou Tristan apparaissait !!!) Anaïs est arrivée en 2007 la veille de l'arrivée de sa mamy du Gabon...

Samedi 30 mai, 10h00 Inès a passé une sale nuit, beaucoup de contractions. Tout cela devient douloureux, on part à la maternité... Après un rapide examen, la sage femme que nous connaissons désormais très bien annonce que ce n'est pas prêt. Inès insiste, elle ne veut pas rentrer à la maison. Qu'on lui déclenche l'accouchement !!! Le Gynécologue arrive et refuse le déclenchement. le risque de césarienne est trop grand. Il tente une petite manipulation naturelle dont je vous épargne les détails et nous devons attendre de voir si les choses bougent ou non. Si rien ne change, retour a la maison. Les contractions se sont calmées, le bébé ne semble pas vouloir venir... Inès est bien décidée à tout faire et demande l'autorisation de sortir marcher un peu. Hélène, sa maman, Laurianne, sa petite soeur, et moi l'accompagnons. Inès veut aller jusqu'à la plage qui est au bout de la route, tout en bas, à 800 m. On est parti, à petits pas... Petite promenade sur la plage. Nous remontons vers la clinique. Inès grimace mais tient bon. 2 petites heures de promenade... Allez !!! Il va bien venir ce sale gosse !!!! On remonte en chambre et attendons l'examen suivant... Mais déception ca ne bouge pas beaucoup. le col s'est légerement ouvert quand même donc elle reste en observation la nuit et rentrera le lendemain si rien n'a bougé... je reste avec elle un peu, puis rentre dormir à la maison vers 21h00.

3h30, coup de téléphone d'Inès, "viens vite, j'ai perdu les eaux, je pense que ca va commencer" je me lève, prépare le petit déjeuner, prend un douche, me rase, coupe mes ongles de pieds, mange mon petit déjeuner, pain grillé, yaourt, orange pressée, thé bien chaud, retour à la salle de bain, coup de peigne, brossage de dents, déodorant, ... et là , drame... Comment s'habiller??? jean? pantalon? costume? chemise? survetement? pyjama? quel dilemme !!!  qui sera là, dans la salle d'accouchement, va-t-on juger ma tenue, comment paraitre auprès d'inès? comment l'accompagner au mieux dans ce moment particulier? mince, j'ai mis du déodorant, ca va pas la déranger??? les odeurs et les femmes enceintes, ca fait pas bon ménage... allez, retour à la douche, savon, shampoing... Mince j'en avais deja fait un... tant pis... mais quel gaspillage de produit cosmétique, vraiment ca m'ennuie, je vais y penser toute la journée, quel mauvais citoyen du monde je fais à me laver deux fois la tête en si peu de temps... j'ai mauvaise conscience... Et maintenant, retour à la réalité: slip ou caleçon? chaussette ou pas? chaussures de ville ou sandales? Dois je paraitre détendu auprès de ma femme ou est-il mieux de lui montrer l'importance de ce moment. ma tenue parlera... S'agit il d'un évènement digne d'une cravatte ou est-il mieux de lui montrer que je suis confiant et que tout cela est du déjà vu, que je suis habitué, que je vais assurer auprès d'elle???? Pfff, dur dur d'être un futur père... On ne parle jamais de tout cela dans les magazines pour femme enceinte... Bon, c'est décidé: Jean et chemise, mi-cool, mi-décontracté... ca devrait passer... Je mets mes converses pour être à l'aise, c'est un peu plus long à lacer, mais je suis comme dans des chaussons dedans, ça va me donner de l'assurance et de la force pour aider ma petite femme dans cette longue et dure épreuve. Parce que si j'avais pris mes chaussures en cuir, j'aurais été un peu coincé, ca m'aurait peut être gêné, inconsciemment... Je prends ma montre, pour avoir l'heure. Et puis, ca fait un peu bijou aussi, ca montre que je suis pas n'importe qui... Auprès de la sage femme, c'est important, qu'elle sache qu'elle a pas affaire à un petit rigolo... J'ai pas de chaine en or, mais je regrette, ce sera à prévoir pour le prochain accouchement... Oups, j'ai failli oublier ma bague... Le drame !!! Parce qu'ici, si tu n'as pas de bague au doigt, c'est que tu es un homme libre, et si jamais, dans le taxi, je croise une femme qui voit çà, elle pourra me provoquer et me faire oublier ce pour quoi j'ai pris le taxi. Je finirais en boite de nuit (ou pire...) au lieu d'aller à la clinique... Inès en sera chagrinnée je pense...

Bon je suis fin prêt. finalement je mets du parfum. BLACK XS de paco rabanne, c'est plutot discret et agréable, ça devrait lui plaire... j'espère. Bon, je sais c'est Paco Rabanne !!!! Je me suis d'ailleurs posé la question sur le moment... Est-il opportun de mettre le  parfum d'un créateur si stupide dans un moment si important? j'ai pesé le pour, le contre, et après une longue réflexion, je me suis dit que c'était le plaisir olfactif qui primait... On verra ce qu'en dira Inès à mon arrivée. Je lui expliquerai mon dilemme. Allez, cette fois, c'est parti...

Ah non, mes papiers... Si on m'arrête, j'aurais l'air malin, au commissariat pendant qu'Inès accouche. Et puis, je dois réveiller mes parents... les prévenir que je pars, pour qu'ils s'occupent de Tristan et Anaïs à leur réveil. Mon père saute du lit "oui? quoi? hein? oui oui? euh... d'accord... bon..." Allez, en route... je sors de la maison et remonte prendre un taxi au carrefour. Mince j'ai oublié l'argent. Vite, retour à la maison, dans la chambre, derrière le petit tableau que ma soeur, Philomène, avait dessiné et offert à Inès pour sa première grossesse "Inès papillon" l'avait elle intitulé... Très beau, je le contemple quelques minutes... de beaux souvenirs reviennent à ma mémoire... Et je pense à Philomène, qui me manque.... Bon... donc derrière le tableau...   3.... 5.... 7 .....2 ...... 6....7.....4  la porte du coffre s'ouvre... Je prends d'autorité le billet de 2000 francs CFA restant (3 euros)

Il est 3H50! Cette fois, c'est vraiment parti. Je réveille Alassane, notre gardien, pour qu'il m'accompagne au carrefour plus haut. Il y a quelques nuits de cela, pour la deuxième ou troisième fois en quelques mois, un homme s'est fait devalisé sous la menace de grosses machettes, à 4H00 du matin !!! Personne ici, ne mettra en doute ma vaillance, mais je ne suis pas fou, je ne monte pas seul jusqu'au carrefour !!! A peine sorti de la maison, un taxi s'arrête: "EL RAPHA, 2000" (c'est le code pour demander d'aller a la clinique EL RAPHA pour 2000 francs - il ne faut pas en dire plus sinon, on ne te comprend pas, pas de bonjour, pas de s'il vous plait, ou j'aimerais aller,.... le lieu, le prix !!! c'est tout. S'il accepte il donne un bref coup de klaxon - à 4h00 du matin merci pour mes enfants et les voisins- et s'il refuse il ne dit rien et s'en va, te plantant là, comme un con...) Il accepte (c'est bien payé. enfin, c'est le prix normal de nuit!). J'ai réveillé Alassane pour rien, je m'en veux...

Maintenant, en montant dans le taxi, je peux saluer et communiquer normalement. La ville est calme. On passe par "derrière la prison" qui est un quartier très populaire (vous avez déjà vu un quartier riche derrière une prison???). J'aime passer par là, c'est toujours vivant, à toute heure du jour ou de la nuit. Ca craint un peu parfois, mais bon, c'est populaire quoi !!! Ca cause fort, ca boit, ca bouffe en bord de route... On n'est pas dans les cités d'Expatriés...

Enfin, on y va, parce que la clinique EL RAPHA, c'est un peu LA clinique de Libreville. La clinique des riches !!! C'est surtout pour nous la seule à bénéficier du Label CFE (caisse des français à l'etranger) qui nous assure le remboursement de la sécu... Et la clinique EL RAPHA borde les quartiers d'expatriés....

Grâce à ma bague anti-filles qui draguent les blancs, je ne subis aucun assaut me détournant de l'objectif de mon voyage... Après 6 minutes de taxi, je débarque à la clinique. Personne à l'entrée, ni à l'acceuil, ni dans les couloirs,... La voie est libre... Je fonce dans la chambre d'Inès, mais elle n'est pas là... Direction le bloc !!!

Il est 4H10 quand j'entre dans la salle d'accouchement. Inès souffre déjà pas mal...

4H15 contraction

4H20 contraction

4H25 contractionnnnnnnnnnnnnn......

4H26 Elias prend sa première bouffée d'oxygène

Ouf.... j'ai bien fait de venir vite, sans trop me préparer ou me poser de questions... J'ai bien failli le rater celui là...